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À Montréal, l’objectif est de devenir l’un des principaux marchés des sciences de la vie en Amérique du Nord

12 avril 2024 5 Minute Read

Jeremy Kenemy and Ralf Carcani standing in a lab

Montréal bénéficie d’une longue tradition d’innovation dans les sciences de la vie. Elle s’étend de la publication du premier Atlas des maladies cardiaques congénitales à la découverte de médicaments antiviraux pour le VIH, jusqu’à la production récente des vaccins à ARNm contre la COVID-19.

Malgré le fait que Montréal soit le marché le plus établi pour les laboratoires commerciaux au Canada, son secteur des sciences de la vie est encore relativement moins développé par rapport à des centres américains tels que Boston ou San Francisco. Néanmoins, le Québec a pris l’engagement d’investir des centaines de millions de dollars afin de positionner la province parmi les cinq pôles nord-américains les plus importants en sciences de la vie d’ici 2027.

Jeremy Kenemy et Ralf Carcani, de CBRE Montréal, sont au cœur de cette dynamique, facilitant les transactions de laboratoires pour les entreprises évoluant dans le secteur des sciences de la vie.

« En 2021, il y avait pratiquement aucune disponibilité de laboratoires à Montréal, explique Jeremy Kenemy. La pandémie a souligné la nécessité d’avoir davantage d’installations dédiées aux sciences de la vie et certains bailleurs ont répondu à cet appel. Bon nombre de ces projets sont actuellement en cours de réalisation et contribuent à répondre à cette demande. »

Jeremy Kenemy et Ralf Carcani viennent de publier le premier rapport Le marché des laboratoires de Montréal 2023 de CBRE. Voici un aperçu de quelques-unes de ses principales conclusions.

Bâtir un écosystème des sciences de la vie

Le Grand Montréal compte 5,6 millions pi² de laboratoires, dont la moitié est répartie entre cinq pôles : Technoparc Montréal, Nexus 40-13, Royalmount, la Cité de la Biotech de Laval et le pôle émergent du centre-ville. Le marché des sciences de la vie affiche un taux de disponibilité de seulement 6,5 %.

Les sociétés de recherche et développement (R-D) constituent la majeure partie du stock de sciences de la vie de la région métropolitaine. Ces groupes ont généralement une empreinte plus petite, la plupart des installations ayant moins de 25 000 pi² de locaux. De nombreuses entreprises de R-D débutent dans des incubateurs, des accélérateurs ou des établissements universitaires de recherche, puis déménagent dans des biens plus grands à mesure qu’elles se développent et mûrissent.

Le reste des laboratoires à Montréal est dédié aux installations respectant les Bonnes Pratiques de Fabrication (BPF). Ces installations sont reponsables de la production et du conditionnement de médicaments, de dispositifs médicaux ainsi que de divers produits pharmaceutiques.

Historiquement, la plupart des laboratoires étaient construits sur mesure pour des locataires spécifiques. Cependant, certains bailleurs, dont HarveyCorp et Alexandria Real Estate Equities, ont anticipé la demande future en convertissant des immeubles de bureaux flexibles et des bâtiments industriels légers en laboratoires spéculatifs clés en main. Récemment, JADCO a inauguré Inspire Bio Innovations, un campus ultramoderne de laboratoires situé près du centre-ville.

Un investissement initial important

« De nombreux bailleurs sont intéressés par le marché immobilier des sciences de la vie, présente Ralf Carcani. Cependant, la conversion des bâtiments pour accueillir des laboratoires requiert d’importants investissements initiaux qui ne correspondent pas au modèle d’affaires de tous. »

Les laboratoires nécessitent des équipements spécialisés, tels que des systèmes de chauffage, de ventilation et de climatisation supplémentaires, une charge au sol accrue et plus d’électricité. Par conséquent, la construction de laboratoires peut s’avérer nettement plus coûteuse que d’autres types de biens immobiliers. De plus, il peut s’écouler plusieurs années avant que les entreprises réalisent des découvertes ou obtiennent des résultats positifs, ce qui représente un risque significativement plus élevé pour les bailleurs et les investisseurs par rapport aux bureaux traditionnels.

Pour Ralf Carcani , « ceux qui souhaitent investir dans le secteur des sciences de la vie doivent adopter une vision à long terme. Cependant, une fois qu’une entreprise s’est associée à un bailleur, elle est généralement très “ loyale ” et a de fortes chances de renouveler ses baux ou d’étendre ses locaux au sein du portefeuille du bailleur sur le long terme. C’est une stratégie gagnante pour ceux qui font preuve de patience. »

Individual lab locations and lab hubs by submarket in Montreal in French

Des alternatives intéressantes

Montréal est attrayante pour les locataires de laboratoires, car elle offre le marché des sciences de la vie le plus abordable en Amérique du Nord. Le loyer net moyen demandé pour les laboratoires dans la ville est de 39,50 $ le pi² par an, une somme bien inférieure à celle enregistrée à Toronto (80 $ le pi²), Boston (136,57 $ le pi²) et New York (149,60 $ le pi²).

La ville produit également le plus grand nombre de diplômés universitaires au Canada, avec actuellement 32 000 étudiants inscrits dans des programmes de sciences de la vie et de technologies de la santé. Cette abondance fait de la ville une source privilégiée de talents pour les entreprises du secteur du secteur. De plus, ces diplômés sont souvent bilingues.

« Les entreprises européennes et francophones considèrent Montréal comme une porte d’entrée sur le marché nord-américain des sciences de la vie, déclare Jeremy Kenemy. Le bilinguisme et la culture de Montréal apportent un certain confort aux entreprises étrangères. C’est un avantage concurrentiel pour notre ville. »

Objectif : être le leader nord-américain

L’objectif du Québec de devenir un pôle nord-américain de premier plan dans le domaine des sciences de la vie est prometteur pour le secteur. La province s’est engagée à investir 569 millions de dollars pour soutenir un investissement direct de 2 milliards de dollars dans l’industrie.

« La plupart des activités du Québec dans le domaine des sciences de la vie se déroulent dans le Grand Montréal, et notre marché bénéficiera donc de cet afflux de fonds, indique Jeremy Kenemy. Mais pour atteindre l’objectif du gouvernement, la province devra inciter les bailleurs et les promoteurs à construire des laboratoires dans les pôles émergents comme le centre-ville de Montréal. »

Pour Ralph Carcani, « la majorité des activités liées aux sciences de la vie au Québec se déroulent dans le Grand Montréal, et notre marché bénéficiera donc de cet apport de fonds. Cependant, pour atteindre l’objectif du gouvernement, la province devra encourager les propriétaires et les promoteurs à construire des laboratoires dans les zones émergentes, comme le centre-ville de Montréal. »

Il ajoute par ailleurs que « les incubateurs et les institutions jouent un rôle crucial en aidant les jeunes entreprises de biotechnologie à se lancer. Étant donné que le climat économique actuel rend le capital-risque plus difficile à obtenir, le gouvernement devra soutenir ces groupes pour atteindre leurs objectifs. »

Perspectives

Bien que Montréal ait besoin de davantage de laboratoires de haute qualité, la ville est devenue un marché attractif pour les bailleurs et les locataires. Les entreprises de recherche et développement sont à la recherche de 620 000 pi², tandis que les entreprises de BPF ont besoin de 650 000 pi². Même si la demande actuelle dépasse les 180 000 pi² de laboratoires disponibles, plus de 900 000 pi² devraient être livrés au cours des 24 prochains mois.

Malgré quelques récents obstacles dans ce domaine, l’industrie américaine des sciences de la vie a enregistré près de dix fois plus de produits en phase 2 ou 3 d’essais cliniques en 2023 qu’il y a 25 ans. Cela suggère une croissance continue à long terme dans ce secteur.

L’essor du secteur de l’intelligence artificielle (IA) à Montréal pourrait également avoir un effet significatif sur l’évolution future du secteur des sciences de la vie. Les technologies de l’IA ont le potentiel de révolutionner le processus de découverte de médicaments en favorisant le développement de traitements ciblés grâce à la médecine de précision. La durée des phases de tests précliniques et cliniques pourrait ainsi en être réduite.

« L’IA permettra aux entreprises de mener davantage de recherches et de mettre plus rapidement des produits pharmaceutiques sur le marché, précise M. Kenemy. Montréal pourrait devenir un chef de file dans la convergence de l’IA et des sciences de la vie. »

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