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Panel CBRE : Les tarifs douaniers de Trump pourraient stimuler la croissance au Canada
06 mars 2025 6 Minute Read

Lors du Forum des prêteurs de capitaux CBRE, les panélistes s’accordaient sur un point : l’impact des tarifs douaniers de l’administration Trump sur les marchés immobiliers commerciaux canadiens reste difficile à prédire.
« Il est impossible de déterminer aujourd’hui quel sera précisément le résultat », a déclaré Rob Kumer, chef de la direction de KingSett Capital, devant plus de 1 000 personnes réunies au Palais des congrès du Toronto métropolitain le 25 février.
« Mais l’effet net de tout cela est que nous mettons de l’ordre dans nos affaires. Les Canadiens réalisent enfin qu’il nous faut une véritable stratégie de croissance. Si ces tarifs sont le catalyseur qui nous permettra de passer à la vitesse supérieure, c’est plutôt encourageant. »
Rob Kumer, dont l’entreprise gère 18 milliards de dollars d’actifs immobiliers, s’est montré « très optimiste » quant à l’avenir : « Les dix prochaines années au Canada seront bien meilleures que les dix précédentes. »
« Cette prochaine décennie pourrait s’avérer très favorable, a-t-il ajouté lors de l’échange avec Paul Morassutti, président du conseil d’administration de CBRE Canada, qui animait la discussion. Nous pourrions voir des signes de reprise dans des secteurs différents de ceux qui ont prospéré ces dix dernières années. Peut-être devrions-nous tous investir dans des immeubles de bureaux en Alberta! »
Impact sur le secteur du logement
Andrew Joyner, directeur général de Tricon Residential, a souligné que si le Canada imposait des droits de douane en représailles sur les intrants du secteur du logement provenant des États-Unis (matériaux de construction, électroménagers, équipements CVC), cela entraînerait une « augmentation importante » des coûts de développement, exerçant davantage de pression sur l’offre de nouveaux logements.
Selon Rob Kumer, son équipe estime que ces droits pourraient augmenter jusqu’à 4 % les coûts totaux de construction des projets résidentiels. « Mais si 4 % représente le pire scénario, pensez à tout ce que nous pouvons faire pour compenser. Nous avons le contrôle sur de nombreux facteurs que nous allons enfin devoir examiner attentivement et optimiser. »
Ugo Bizzarri, chef de la direction d’Hazelview Investments, a noté une différence majeure avec 2018, lorsque Trump avait imposé des droits sur l’acier : le marché des copropriétés de la région du Grand Toronto est actuellement en sommeil.
« À l’époque, il n’y avait pas assez d’entreprises pour construire. Aujourd’hui, c’est différent. Les entreprises recherchent du travail, et sur plusieurs projets, nous avons constaté une baisse de 8 à 10 % du coût du béton et des produits en acier. C’est donc le moment opportun pour se lancer dans la construction multirésidentielle. »
Ugo Bizzarri, dont l’entreprise gère 12 milliards de dollars d’actifs immobiliers, a souligné qu’indépendamment des tarifs potentiels, « l’immobilier n’est pas un secteur dans lequel on investit pour un cycle à court terme. Nous envisageons des cycles à long terme pour tous nos investissements, particulièrement dans l’immobilier ».
« Par conséquent, ces perturbations représentent simplement un bruit de fond pour nous actuellement. »

La viabilité des projets multirésidentiels
Paul Morassutti a interrogé le panel sur la viabilité économique des projets de copropriété et de location dans le contexte actuel, compte tenu des menaces tarifaires, des coûts de construction historiquement élevés et des prévisions de loyers en baisse.
Le marché foncier est « en pleine évolution, a souligné Andrew Joyner. Et il évolue dans une direction qui permettra au coût des intrants de contribuer positivement à l’équation financière, facilitant ainsi la rentabilité des projets ».
Rejoignant l’observation de Ugo Bizzarri, Andrew Joyner a indiqué que le coût des travaux préliminaires comme l’étaiement, l’excavation et le coffrage — « le poste le plus important des coûts de construction » — diminue « considérablement, et de plus en plus de postes suivent cette tendance. Les taux d’intérêt des prêts à la construction sont également en baisse. »
« Tous ces facteurs combinés font baisser le dénominateur du rendement dans nos calculs de coûts, ce qui est positif pour le secteur. »
Ugo Bizzarri a insisté sur le déséquilibre persistant entre l’offre insuffisante de logements multirésidentiels et la « forte demande », soulignant que les promoteurs doivent commencer à construire des logements locatifs immédiatement sans attendre une hypothétique baisse des coûts. « Si vous pensez que les calculs économiques ne sont pas favorables aujourd’hui, ce sera pire dans trois ans. C’est donc le moment idéal pour se lancer. »
Andrew Joyner a fait remarquer qu’une grande partie du problème découle d’un manque de coordination entre les différents niveaux de gouvernement en matière de politique du logement.
« La situation actuelle n’est pas optimale. Trop souvent, les politiques municipales vont dans une direction tandis que les politiques fédérales en prennent une autre, avec des effets contradictoires. »
Le potentiel du logement abordable
Rob Kumer a indiqué que KingSett connaît « beaucoup de succès » avec des projets de logements abordables dans la région du Grand Toronto. « Chaque transaction est unique et nécessite un travail sur mesure en collaboration avec tous les niveaux de gouvernement et la SCHL pour créer une structure viable. »
« Ce secteur représente une part importante de notre activité. Nous avons levé 180 millions de dollars de capitaux pour des logements abordables il y a quelques années, puis 90 millions supplémentaires. Nous recherchons encore 10 millions avant de clôturer cette levée, avec un financement complémentaire à venir. »
« Au total, cela permettra de financer des projets d’une valeur allant jusqu’à 3 milliards de dollars. »
« Le logement abordable est donc un secteur très prometteur. Cela demande des efforts, du temps et des investissements, mais en fin de compte, il est possible d’être rentable tout en étant créatif sur ce marché. »
Le succès du repositionnement de Scotia Plaza
Le repositionnement de l’emblématique Scotia Plaza sur le marché des bureaux de Toronto a également été une réussite notable pour Rob Kumer et son équipe.
Face à une disponibilité de 350 000 pi² à la suite du réaménagement des locaux de la Banque Scotia et au déménagement de certains bureaux vers le Bay Adelaide Centre, KingSett et AIMCo ont investi massivement dans cette tour de bureaux datant de 1988, la transformant en première tour de bureaux certifiée « zéro carbone » au Canada.
Ils ont également amélioré les équipements, notamment en transformant le 68e étage en un espace de détente pour les locataires géré par Oliver & Bonacini.
« Tous les bureaux vacants de Scotia Plaza sont désormais pratiquement tous loués », a déclaré Rob Kumer, qui a félicité le partenaire exploitant BentallGreenOak (BGO) pour « son travail opérationnel exceptionnel » en adoptant une « approche hôtelière » du service dans l’immeuble.
« Tout cela démontre que dans un environnement opérationnel très difficile, avec les bons investissements, les bonnes équipes et la bonne stratégie, on peut accomplir de grandes choses. C’est une réussite remarquable pour nous. »
Perspectives d’avenir
Face à la négativité ambiante, Paul Morassutti a demandé aux panélistes de partager une pensée positive avec l’audience du Forum.
Ugo Bizzarri a prédit que les années à venir constitueront une « période positive » pour l’immobilier. « Le Canada est un pays formidable. Il y a beaucoup d’instabilité dans le monde, mais je pense qu’il se passe de nombreuses choses positives au Canada dont nous pouvons tirer parti. »
« Nous devons apporter certains changements politiques pour améliorer la situation, a-t-il ajouté, mais fondamentalement, le Canada présente d’excellentes perspectives à long terme. »
Rob Kumer a conclu en rappelant que « tout le monde se plaint que les prix sont trop élevés et les rendements trop faibles en période de prospérité ». Aujourd’hui, c’est l’inverse, a-t-il souligné, citant l’adage : « Soyez craintif quand les autres sont avides et avide quand les autres sont craintifs. »
« Nous y voilà : tout le monde est craintif et négatif. Alors, passez à l’action et saisissez les occasions. Ramenez vos équipes au bureau, redoublez d’efforts, et vous réussirez. Il y a beaucoup à faire — alors au travail! »
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