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Les perspectives immobilières pour 2025 de Paul Morassutti
04 décembre 2024 7 Minute Read

« Ne cédez pas au pessimisme ambiant », a déclaré Paul Morassutti, président du conseil d’administration de CBRE Canada, à son auditoire lors du Forum immobilier de Toronto le 4 décembre dernier.
« Des défis existent, et je les aborderai, a-t-il déclaré lors de son discours d’ouverture. Cependant, le marché est plus optimiste aujourd’hui qu’il ne l’a été au cours des deux dernières années. »
« Il s’explique principalement par l’atténuation de la crise du coût du capital, qui avait perturbé la liquidité et influencé la prise de décision. »
Selon Paul Morassutti, avec la baisse des taux d’intérêt, « les capitaux à la recherche de rendement regagnent maintenant l’immobilier. C’est l’une des raisons du rebond quasi record des FPI au T3, marquant le meilleur trimestre depuis le T2 2009 ».
« La baisse des taux apportera plus de stabilité au marché et rapprochera inévitablement acheteurs et vendeurs. Le volume des transactions s’accélère déjà. La formation de capital s’améliore. Les prêteurs retrouvent leur confiance. »
« Nous anticipons une année 2025 nettement plus dynamique que 2024. »
Le marché des bureaux souffre du manque de démolition, non d’une suroffre
Un regain de confiance s’installe sur le marché des bureaux, et de nombreux signes indiquent qu’une reprise se dessine, CBRE prévoyant que la disponibilité des bureaux atteindra un sommet en 2025.
La vague de nouvelle offre au pays s’achève et atteindra en 2025 son plus bas niveau depuis 20 ans. « L’impact sur la disponibilité et les loyers sera sensible et positif, comme lors des cycles précédents, a précisé Paul Morassutti. D’ailleurs, sans les nouvelles constructions des cinq dernières années à Toronto, et toutes choses égales par ailleurs, notre taux d’inoccupation global serait inférieur à 7 %. »
« La disponibilité des bureaux dépend clairement de la qualité des immeubles et de leur emplacement, critères désormais bien identifiés par les occupants, a-t-il poursuivi. Ainsi, les immeubles haut de gamme bien situés sont sous-offerts, contrairement aux biens plus standards. Nous faisons face non pas à une surproduction, mais à une sous-démolition. »
Cette observation est particulièrement pertinente concernant la durabilité. Paul Morassutti a fait remarquer que le directeur général d’une grande banque internationale identifiait le manque de bureaux durables comme un défi majeur. « La banque visait la neutralité carbone de son portefeuille d’ici 2035, mais 90 % de leurs actifs en sont encore loin. »
Un optimisme de bon aloi pour le bureau
Les derniers sondages de CBRE auprès des occupants révèlent qu’un nombre croissant d’entreprises envisagent une expansion cette année par rapport à l’an dernier, tandis que moins d’entre elles prévoient des réductions d’effectifs. En outre, le recul de la disponibilité des sous-locations, généralement annonciateur d’une stabilisation du marché, indique que moins de locataires cherchent à céder leurs espaces. Quant au taux de disponibilité des immeubles de prestige, il a atteint son plus bas niveau depuis quatre ans, avec des hausses de loyer qui se multiplient.
Concernant le travail à distance, Paul Morassutti a confirmé que « la tendance du retour au bureau s’affirme nettement ». Il a souligné que McKinsey, un leader mondial des services-conseils, spécialisé dans l’optimisation du rendement des entreprises, a demandé à ses employés de venir plus souvent au bureau. « C’est très révélateur. »
Le secteur des bureaux évoluera au-delà de la « notion quelque peu simpliste de fragmentation, a-t-il indiqué. Celle-ci sera plus poussée. »
Au sommet se trouveront les immeubles neufs, technologiquement avancés et carboneutres, bénéficiant d’une demande soutenue. En dessous, les produits plus anciens, mais bien aménagés, bien situés et performants en matière de durabilité devraient également afficher de bons rendements. Plus bas encore, une partie du parc connaîtra probablement des performances inégales.
« Et au dernier niveau, a ajouté Paul Morassutti, certains actifs pourraient ne jamais se redresser. »
La reprise du détail se confirme
Au Canada, le taux de disponibilité des locaux commerciaux passe sous la barre des 4 %, avec une activité locative à son plus haut niveau depuis plusieurs années. Les locataires peinent de plus en plus à trouver des locaux, et les loyers augmentent dans tout le pays, tous formats confondus. Le commerce de proximité et le commerce de détail affichent des performances remarquables.
Faisant le parallèle avec le secteur des bureaux, Paul Morassutti a souligné « l’effet positif de ne pas ajouter beaucoup de nouvelle offre ».
« Aucun centre commercial couvert n’a été construit depuis des décennies. Les nouveaux projets comme Royalmount à Montréal sont l’exception, et de nombreux centres commerciaux ont été reconvertis. Il en résulte des fondamentaux solides et un regain d’intérêt des investisseurs. Une leçon à retenir pour le marché des bureaux. »
Selon Paul Morassutti, le principal défi du secteur reste évident : le ralentissement économique. Les ménages font face à un marché du travail moins dynamique, une croissance salariale ralentie et une vague de renouvellements hypothécaires dans un contexte de taux élevés en 2025.
« La suppression de la TPS sur les achats de Noël pourrait offrir un répit temporaire aux consommateurs, sans plus. »
Le marché multirésidentiel se calme
En 2024, un niveau record de condominiums invendus s’ajoute à des loyers déjà peu abordables. En conséquence, pour Paul Morassutti, « la croissance des loyers du secteur multirésidentiel commence à plafonner, particulièrement dans les zones les plus chères, et la révision à la baisse des objectifs d’immigration ne fera qu’accentuer ce ralentissement ».
« Nous considérons toutefois qu’il s’agit davantage d’un enjeu cyclique à court terme que d’un handicap structurel, la croissance démographique du Canada devant rester la plus forte du G7, même avec des cibles d’immigration réduites. »
Concernant le marché des condos, notamment à Toronto, 2024 a été « une année catastrophique », les ventes de septembre chutant d’environ 90 % par rapport à la moyenne décennale.
Très peu de nouveaux projets et de ventes ont été enregistrés en 2024. « Ces chiffres suggèrent qu’en l’absence de ventes aujourd’hui, une pénurie sévère d’unités se profilerait dans 3 à 5 ans, une fois le marché et l’économie normalisés, pouvant déclencher une nouvelle flambée des prix. »
« Cette analyse, bien que logique, néglige un élément crucial, a ajouté Paul Morassutti. Le marché des condos torontois dépend des investisseurs. Sans eux, impossible de prévendre un projet, et la reprise complète du marché est conditionnée à leur retour. »
Quelles conséquences pour les propriétaires d’appartements? « Généralement, la réduction de l’offre future de copropriétés — dont la majorité devient locative — implique moins de concurrence une fois les stocks actuels absorbés. Malgré les difficultés immédiates, les perspectives à long terme du secteur multirésidentiel restent très prometteuses. »
Retour à la normale dans l’industrie
Le secteur industriel en 2024-2025 s’articule autour de trois axes pour Paul Morassutti : l’offre et la demande, la normalisation du marché et son contexte.
Face à une disponibilité historiquement basse et des loyers en hausse, la construction s’est fortement intensifiée en 2023, précisément au moment où la demande fléchissait.
« Les 3PL expliquent en grande partie ce recul. Après une suroccupation les années précédentes et face à un consommateur canadien plus prudent, les détaillants ont également réduit leurs stocks. Il en résulte un pic de disponibilité en sous-location, au plus haut depuis 8 ans. »
« Le rendement de l’économie jouera un rôle important dans la tenue de l’industrie en 2025, a-t-il affirmé, mais globalement, nous restons optimistes sur les perspectives à long terme du secteur industriel et logistique. »
Le Canada à la dérive?
Paul Morassutti a rappelé qu’il ne se souvenait pas d’une année « où tant de voix ont qualifié le Canada, et Toronto, de dysfonctionnels. Je m’en suis moi-même rendu coupable. Paralysie politique, bureaucratie sclérosée, productivité en berne, crise du logement abordable et congestion record à Toronto — tout suggère que le Canada aurait perdu son élan. Une inquiétude légitime. »
Le Canada a-t-il des problèmes réels? « Certainement, a-t-il assuré. Et vous en entendrez encore beaucoup parler. Mais quel pays en est exempt? »
« Il est important de contextualiser. À mesure que le monde devient moins stable, le Canada — petit pays sûr et stable — n’en paraîtra que plus attractif. »
« Je pense que nous devrions garder à l’esprit que nombreux sont les pays qui envieraient nos problèmes. Rappelons-nous notre chance de travailler et vivre dans notre pays. Ses forces et son potentiel dépassent largement ses faiblesses, et l’avenir est bien plus prometteur que ne le prétendent les prophètes de malheur. »
« Ne cédez pas au pessimisme ambiant. »
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